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 Traité politique de Spinoza (2)

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zubule
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zubule


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MessageSujet: Traité politique de Spinoza (2)   Traité politique de Spinoza (2) Icon_minitimeJeu 29 Sep - 10:54





CHAPITRE VIII. DE L’ ARISTOCRATIE.1. Je n’ai encore parlé que de la monarchie, Maintenant, comment faut-il organiser le gouvernement aristocratique pour qu’il puisse durer ? c’est ce que je vais dire. J’ai appelé gouvernement aristocratique celui qui est dirigé, non par un seul, mais par un certain nombre de citoyens élus parmi la multitude (je les nommerai dorénavant patriciens). Remarquez que je dis un certain nombre de citoyens élus. En effet, il y a cette différence principale entre le gouvernement démocratique et l’aristocratique, que dans celui-ci le droit de gouverner dépend de la seule élection, tandis que dans l’autre il dépend, comme je le montrerai au lieu convenable, soit d’un droit inné, soit d’un droit acquis par le sort ; et par conséquent, alors même que dans un État tous les citoyens pourraient être admis à entrer dans le corps des patriciens, ce droit n’étant pas héréditaire et ne se transmettant pas à d’autres en vertu d’une loi commune, l’État ne laisserait pas d’être aristocratique, et cela parce que nul n’y serait reçu parmi les patriciens qu’en vertu d’une expresse élection. Maintenant, si vous n’admettez que deux patriciens, l’un s’efforcera d’être plus puissant que l’autre, et l’État risquera, à cause de la trop grande puissance de chacun d’eux, d’être divisé en deux factions, et il risquera de l’être en trois, quatre ou cinq factions, si le pouvoir est entre les mains de trois, quatre ou cinq patriciens. Les factions, au contraire, seront plus faibles à mesure qu’il y aura un plus grand nombre de gouvernants. D’où il suit que pour que le gouvernement aristocratique soit stable, il faut tenir compte de la grandeur de l’empire pour déterminer le minimum du nombre des patriciens.

2. Posons en principe que pour un empire de médiocre étendue c’est assez qu’il y ait cent hommes éminents investis du pouvoir souverain et par conséquent du droit de choisir leurs collègues, à mesure que l’un d’eux vient à perdre la vie. Il est clair que ces personnages feront tous les efforts imaginables pour se recruter parmi leurs enfants ou leurs proches, d’où il arrivera que le pouvoir souverain restera toujours entre les mains de ceux que le sort a faits fils ou parents de patriciens. Et comme sur cent individus que le sort fait monter aux honneurs, il s’en rencontre à peine trois qui aient une capacité éminente, il s’ensuit que le gouvernement de l’État ne sera pas entre les mains de cent individus, mais de deux ou trois seulement d’un talent supérieur qui entraîneront tout le reste ; et chacun d’eux, selon le commun penchant de la nature humaine, cherchera à se frayer une voie vers la monarchie. Par conséquent, dans un empire qui par son étendue exige au moins cent hommes éminents, il faut, si nous calculons bien, que le pouvoir soit déféré à cinq mille patriciens pour le moins. De cette manière, en effet, on ne manquera jamais de trouver cent individus éminents, en supposant toutefois que sur cinquante personnes qui aspirent aux honneurs et qui les obtiennent, on trouve toujours un individu qui ne soit pas inférieur aux meilleurs, outre ceux qui tâchent d’égaler leurs vertus et qui à ce titre sont également dignes de gouverner.

3. Il arrive le plus souvent que les patriciens appartiennent à une seule ville qui est la capitale de tout l’empire et qui donne son nom à l’État ou à la république, comme par exemple cela s’est vu dans les républiques de Rome, de Venise, de Gênes, etc. Au contraire, la république des Hollandais tire son nom de la province tout entière, d’où il arrive que les sujets de ce gouvernement jouissent d’une plus grande liberté.

Mais avant de déterminer les conditions fondamentales du gouvernement aristocratique, remarquons la différence énorme qui existe entre un pouvoir confié à un seul homme et celui qui est entre les mains d’une assemblée suffisamment nombreuse. Et d’abord la puissance d’un seul homme est toujours disproportionnée au fardeau de tout l’empire (comme nous l’avons fait voir, article 5 du chapitre VI), inconvénient qui n’existe pas pour une assemblée suffisamment nombreuse ; car, du moment que vous la reconnaissez telle, vous accordez qu’elle est capable de suffire au poids de l’État. Par conséquent, tandis que le Roi a toujours besoin de conseillers, cette assemblée peut s’en passer. En second lieu, les rois sont mortels ; les assemblées, au contraire, sont éternelles, et par suite, la puissance de l’État, une fois mise entre les mains d’une assemblée suffisamment nombreuse, ne revient jamais à la multitude, ce qui n’a pas lieu dans le gouvernement monarchique, ainsi que nous l’avons montré à l’article 25 du précédent chapitre. Troisièmement, le gouvernement d’un Roi est toujours précaire, à cause de l’enfance, de la maladie, de la vieillesse et autres accidents semblables ; au lieu que la puissance d’une assemblée subsiste une et toujours la même.

Quatrièmement, la volonté d’un seul homme est fort variable et fort inconstante, d’où il résulte que tout le droit de l’État monarchique est dans la volonté expliquée du Roi (comme nous l’avons fait voir dans l’article 1 du chapitre précédent), sans que pour cela toute volonté du Roi doive être le droit ; or cette difficulté disparaît quand il s’agit de la volonté d’une assemblée suffisamment nombreuse. Car cette assemblée, n’ayant pas besoin de conseillers (comme on vient de le dire), il s’ensuit que toute volonté expliquée émanant d’elle est le droit même. Je conclus de là que le gouvernement confié à une assemblée suffisamment nombreuse est un gouvernement absolu, ou du moins celui qui approche le plus de l’absolu ; car s’il y a un gouvernement absolu, c’est celui qui est entre les mains de la multitude tout entière.

4. Toutefois, en tant que le pouvoir dans un État aristocratique ne revient jamais à la multitude (ainsi qu’il a été expliqué plus haut) et que la multitude n’y a pas voix délibérative, toute volonté du corps des patriciens étant le droit, le gouvernement aristocratique doit être considéré comme entièrement absolu, et quand il s’agit d’en poser les bases, il faut s’appuyer uniquement sur la volonté et le jugement de l’Assemblée des patriciens, et non pas sur la vigilance de la multitude, puisque celle-ci n’a ni voix consultative, ni droit de suffrage. Ce qui fait que dans la pratique ce gouvernement n’est pas absolu, c’est que la multitude est un objet de crainte pour les gouvernants et qu’à cause de cela même elle obtient quelque liberté, non par une loi expresse, mais par une secrète et effective revendication.

5. Il devient donc évident que la meilleure condition possible du gouvernement aristocratique, c’est d’être le plus possible un gouvernement absolu, c’est d’avoir à craindre le moins possible la multitude, et de ne lui donner aucune autre liberté que celle qui dérive nécessairement de la constitution de l’État, liberté qui dès lors est moins le droit de la multitude que le droit de l’État tout entier revendiqué et conservé par les seuls patriciens. A cette condition, en effet, la pratique sera d’accord avec la théorie (comme cela résulte de l’article précédent, et d’ailleurs la chose est de soi manifeste). Car il est clair que le gouvernement sera d’autant moins entre les mains des patriciens que la plèbe revendiquera plus de droits, comme il arrive en basse Allemagne dans ces collèges d’artisans qu’on appelle gilden.

6. Et il ne faut pas craindre, parce que le pouvoir appartiendra absolument à l’Assemblée des patriciens, qu’il y ait danger pour la plèbe de tomber dans un funeste esclavage. En effet, ce qui détermine la volonté d’une assemblée suffisamment nombreuse, ce n’est pas tant la passion que la raison. Car la passion pousse toujours les hommes en des sens contraires, et il n’y a que le désir des choses honnêtes ou du moins des choses qui ont une apparence d’honnêteté qui les unisse dans une seule pensée.

7. Ainsi donc le point capital dans l’établissement des bases du gouvernement aristocratique, c’est qu’il faut l’appuyer sur la seule volonté et la seule puissance de l’Assemblée suprême, de telle sorte que cette Assemblée s’appartienne, autant que possible, à elle-même et n’ait aucun péril à redouter de la multitude. Essayons d’atteindre ce but, et, pour cela, rappelons quelles sont dans le gouvernement monarchique les conditions de la paix de l’État, conditions qui sont propres à la monarchie et par conséquent étrangères au gouvernement aristocratique. Si nous parvenons à y substituer des conditions équivalentes, convenables à l’aristocratie, toutes les causes de sédition seront supprimées, et nous aurons un gouvernement où la sécurité ne sera pas moindre que dans le gouvernement monarchique. Elle y sera même d’autant plus grande et la condition générale de l’État sera d’autant meilleure que l’aristocratie est plus près que la monarchie du gouvernement absolu, et cela sans dommage pour la paix et la liberté (voyez les articles 3 et 6 du présent chapitre). Plus est grand, en effet, le droit du souverain pouvoir, plus la forme de l’État s’accorde avec les données de la raison (par l’article 5 du chapitre III), et plus par conséquent elle est propre à conserver la paix et la liberté. Parcourons donc les questions traitées au chapitre VI, article 9, afin de rejeter toutes les institutions inconciliables avec l’aristocratie et de recueillir celles qui lui conviennent.

8. Premièrement, qu’il soit nécessaire de fonder et de fortifier une ou plusieurs villes, c’est ce dont personne ne peut douter. Mais il faut principalement fortifier la ville qui est la capitale de l’empire, et en outre les villes frontières. En effet, il est clair que la ville qui est la tête de l’État et qui en possède le droit suprême doit être plus forte que toutes les autres. Au reste il est tout à fait inutile, dans ce gouvernement, de diviser les habitants en familles.

9. En ce qui touche l’armée, puisque dans le gouvernement aristocratique ce n’est pas entre tous les citoyens, mais entre les patriciens seulement qu’il faut chercher l’égalité, et d’ailleurs et avant tout, puisque la puissance des patriciens est plus grande que celle de la plèbe, il s’ensuit qu’une armée uniquement formée de citoyens, à l’exclusion des étrangers n’est pas une institution qui dérive des lois nécessaires de ce gouvernement. Ce qui est indispensable, c’est que nul ne soit reçu au nombre des patriciens, s’il ne connaît parfaitement l’art militaire. Quelques-uns vont jusqu’à soutenir que les citoyens ne doivent pas faire partie de l’armée ; c’est une exagération absurde. Car, outre que la solde payée aux citoyens reste dans l’empire, au lieu qu’elle est perdue si on la paye à des étrangers, ajoutez qu’exclure les citoyens de l’armée, c’est altérer la plus grande force de l’État. N’est-il pas certain, en effet, que ceux-là combattent avec une vertu singulière qui combattent pour leurs autels et pour leurs foyers ? Je conclus de là que c’est encore une erreur que de vouloir choisir les généraux d’armée, les tribuns, les centurions, etc. parmi les seuls patriciens. Comment trouverez-vous de la vertu militaire là où vous ôtez toute espérance de gloire et d’honneurs ? D’un autre côté, défendre aux patriciens d’engager une troupe étrangère, quand les circonstances le demandent, soit pour leur propre défense et pour réprimer les séditions, soit pour d’autres motifs quelconques, ce serait une mesure inconsidérée et contraire au droit souverain des patriciens (voyez les articles 3, 4 et 5 du présent chapitre). Du reste, le général d’un corps de troupes ou de l’armée tout entière doit être élu pour le temps de la guerre seulement et parmi les seuls patriciens ; il ne doit avoir le commandement que pour une année au plus et ne peut être ni continué, ni plus tard réélu. Cette loi, nécessaire dans la monarchie, est plus nécessaire encore dans le gouvernement aristocratique. En effet, comme nous l’avons dit plus haut, bien qu’il soit plus facile de transférer l’empire d’un seul individu à un autre que d’une assemblée libre à un seul individu, cependant il arrive souvent que les patriciens sont opprimés par leurs généraux, et cela avec un bien plus grand dommage pour la république. En effet, quand un monarque est supprimé, il y a changement, non pas de gouvernement, mais seulement de tyran. Mais dans un gouvernement aristocratique, quand il y a un maître, tout l’État est renversé et les principaux citoyens tombent en ruine. On en a vu à Rome les exemples les plus désastreux.

Les motifs qui nous ont fait dire que dans une monarchie l’armée ne doit pas avoir de solde n’existent plus dans le gouvernement aristocratique. Car les sujets étant écartés des conseils de l’État et privés du droit de suffrage, ils doivent être considérés comme des étrangers et par conséquent les conditions de leur engagement dans l’armée ne peuvent pas être moins favorables que celles des étrangers. Et il n’y a pas à craindre ici qu’il y ait pour eux des préférences. Il sera même sage, afin que chacun ne soit pas, selon la coutume, un appréciateur partial de ses actions, que les patriciens fixent une rémunération déterminée pour le service militaire.

10. Par cette même raison que tous les sujets, à l’exception des patriciens, sont des étrangers, il ne se peut faire sans péril capital pour l’État que les champs, les maisons et tout le sol restent propriété publique et soient loués aux habitants moyennant un prix annuel. En effet, les sujets n’ayant aucune part au gouvernement de l’État ne manqueraient pas, en cas de malheur, de quitter les villes, s’il leur était permis d’emporter où ils voudraient les biens qu’ils auraient entre les mains. Ainsi donc les champs et les fonds de terre ne seront pas loués aux sujets, mais vendus à cette condition toutefois qu’ils versent au trésor tous les ans une partie déterminée de leur récolte, etc., comme cela se fait en Hollande.

11. Je passe à l’organisation qu’il faudra donner à l’Assemblée suprême. On a fait voir, article 2 du présent chapitre, que pour un empire de médiocre étendue, les membres de cette Assemblée devaient être au nombre de cinq mille environ, et par conséquent il faut aviser à ce que ce chiffre, au lieu de décroître par degrés, s’augmente au contraire à proportion de l’accroissement de l’empire ; puis il faut faire en sorte que l’égalité se conserve, autant que possible, entre les patriciens, et aussi que l’expédition des affaires dans l’assemblée se fasse promptement ; enfin, que la puissance des patriciens ou de l’assemblée soit plus grande que celle de la multitude, sans toutefois que la multitude ait aucun dommage à en souffrir.

12. Or, pour obtenir le premier de ces résultats, une grande difficulté s’élève, et d’où vient-elle ? de l’envie. Car les hommes, nous l’avons dit, sont naturellement ennemis, de sorte que tout liés qu’ils soient par les institutions sociales, ils restent ce que la nature les a faits. Et c’est là, je pense, ce qui explique pourquoi les gouvernements démocratiques se changent en aristocraties et les aristocraties en États monarchiques. Car je me persuade aisément que la plupart des gouvernements aristocratiques ont été d’abord démocratiques. Une masse d’hommes cherche de nouvelles demeures ; elle les trouve et les cultive. Jusque-là le droit de commander est égal chez tous, nul ne donnant volontiers le pouvoir à un autre. Mais bien que chacun trouve juste d’avoir à l’égard de son voisin le même droit que son voisin a par rapport à lui, ils ne trouvent pas également juste que des étrangers, qui sont venus en grand nombre se fixer dans le pays, aient un droit égal au leur, au sein d’un État qu’ils ont fondé pour eux-mêmes avec de grandes peines et au prix de leur sang. Or, ces étrangers eux-mêmes, qui ne sont pas venus pour prendre part aux affaires de l’État, mais pour s’occuper de leurs affaires particulières, reconnaissent leur inégalité, et pensent qu’on leur accorde assez en leur permettant de pourvoir à leurs intérêts domestiques avec sécurité. Cependant la population de l’État augmente par l’affluence des étrangers, et peu à peu ceux-ci prennent les mœurs de la nation, jusqu’à ce qu’enfin on ne les distingue plus que par cette différence qu’ils n’ont pas droit aux fonctions publiques. Or, tandis que le nombre des étrangers s’accroît tous les jours, celui des citoyens au contraire diminue par beaucoup de causes. Souvent des familles viennent â s’éteindre ; d’autres sont exclues de l’État pour cause de crimes ; la plupart, à cause du mauvais état de leurs affaires privées, négligent la chose publique, et pendant ce temps-là un petit nombre de citoyens puissants ne poursuit qu’un but, savoir de régner seuls. Et c’est ainsi que par degrés le gouvernement tombe entre les mains de quelques-uns, et puis d’un seul. Voilà quelques-unes des causes qui détruisent les gouvernements, et il y en a plusieurs autres que je pourrais indiquer ; mais comme elles sont assez connues, je les passe sous silence pour exposer avec ordre les lois qui doivent être pour le gouvernement aristocratique un principe de stabilité.

13. La première de ces lois, c’est celle qui déterminera le rapport du nombre des patriciens à la population générale de l’État. Ce rapport, en effet (d’après l’article 1 du présent chapitre), doit être tel que le nombre des patriciens s’accroisse en raison de l’accroissement de la population. Or, nous avons vu (article 2 du présent chapitre) qu’il convient d’avoir un patricien sur cinquante individus pour le moins ; car le nombre des patriciens (d’après l’article 1 du présent chapitre) pourrait être plus grand, sans que la forme de l’État fût changée, le danger ne commençant qu’avec leur petit nombre. Maintenant, par quel moyen doit-on veiller à ce que cette loi ne souffre aucune atteinte ? c’est ce que je montrerai bientôt, quand le moment en sera venu.

14. Les patriciens sont choisis parmi certaines familles seulement et dans certains lieux. Mais établir qu’il en sera ainsi par une loi expresse, ce serait dangereux ; car outre que souvent les familles viennent à s’éteindre et qu’il y a une sorte d’ignominie pour les familles exclues, ajoutez qu’il répugne à la forme du gouvernement dont nous parlons que la dignité patricienne y soit héréditaire (par l’article 1 du présent chapitre). Mais par cette raison, ce gouvernement semble être plutôt une démocratie, telle que celle que nous avons décrite à l’article 12 du présent chapitre, je veux dire un État où le pouvoir est entre les mains d’un très-petit nombre de citoyens. D’un autre côté, vouloir empêcher les patriciens d’élire leurs fils et leurs parents, de sorte que le pouvoir ne se perpétue pas dans quelques familles, c’est une chose impossible et même absurde, comme je le ferai voir plus haut à l’article 39. Pourvu donc que les patriciens n’obtiennent pas ce privilège par une loi expresse, et que les autres citoyens ne soient pas exclus (je parle de ceux qui sont nés dans l’empire, qui en parlent la langue, qui n’ont pas épousé des étrangères, qui ne sont pas infâmes, qui enfin ne vivent pas du métier de domestiques ou de quelque autre office servile, et je compte les marchands de vin et de bière dans cette dernière catégorie), l’État gardera sa forme, et le rapport entre les patriciens et la multitude pourra toujours être conservé.

15. Que si l’on établit en outre par une loi que nul ne soit élu avant un certain âge, il n’arrivera jamais que le pouvoir se concentre dans un petit nombre de familles. Il faut donc qu’il y ait une loi qui interdise de porter sur la liste des éligibles quiconque n’a pas trente ans révolus.

16. En troisième lieu, il sera établi que tous les patriciens doivent à certaines époques marquées s’assembler dans un endroit déterminé de la ville, et que tout absent qui n’aura pas été empêché par la maladie ou par quelque service public sera frappé d’une amende pécuniaire assez forte. Sans cela, en effet, le plus grand nombre négligerait les affaires publiques pour s’occuper de ses intérêts privés.

17. L’office de cette Assemblée est de faire les lois et de les abroger, de choisir les patriciens et tous les fonctionnaires de l’État. Il est impossible, en effet, qu’un corps qui possède, comme l’Assemblée dont il s’agit, le droit du souverain, donne à qui que ce soit le pouvoir de faire les lois ou de les abroger, sans abandonner aussitôt son droit et le mettre dans les mains de celui auquel il donnerait un tel pouvoir ; car posséder, même un seul jour, le pouvoir de faire les lois ou de les abroger, c’est être en mesure de changer toute l’organisation de l’État. Il n’en est pas de même de l’administration des affaires quotidiennes ; l’Assemblée peut s’en décharger pour un temps sans rien perdre de son droit souverain. Ajoutons que si les fonctionnaires de l’État étaient élus par un autre que par l’Assemblée, celle-ci serait composée, non plus de patriciens, mais de pupilles.

18. Il y a des peuples qui donnent à l’Assemblée des patriciens un directeur ou prince, tantôt nommé à vie, comme à Venise, tantôt pour un temps, comme à Gênes ; mais cela se fait avec de telles précautions qu’on voit assez que cette élection met l’État dans un grand danger. Il est hors de doute, en effet, que l’État se rapproche alors beaucoup de la monarchie. Aussi bien ce qu’on sait de l’histoire de ces peuples donne à penser qu’avant la constitution des assemblées patriciennes, ils avaient eu une sorte de roi sous le nom de directeur ou de doge. Et par conséquent l’institution d’un directeur peut bien être un besoin nécessaire de telle nation, mais non du gouvernement aristocratique considéré d’une manière absolue.

19. Cependant, comme le souverain pouvoir est aux mains de l’Assemblée tout entière et non de chacun de ses membres (car autrement elle ne serait plus qu’une multitude en désordre), il est nécessaire que les patriciens soient si étroitement liés entre eux par les lois qu’ils ne composent qu’un seul corps, régi par une seule âme. Or les lois toutes seules sont par elles-mêmes de faibles barrières et faciles à briser, quand surtout les hommes chargés de veiller à leur conservation sont ceux-là même qui peuvent les violer et qui sont tenus de se maintenir réciproquement dans l’ordre par la crainte du châtiment. Il y a donc là un cercle vicieux énorme, et nous devons chercher un moyen de garantir la constitution de l’Assemblée et les lois de l’État, de telle sorte cependant qu’il y ait entre les patriciens autant d’égalité que possible.

20. Or, comme l’institution d’un seul directeur ou prince, qui aurait aussi le droit de suffrage dans l’Assemblée, entraîne nécessairement une grande inégalité (car enfin il faut, si on l’institue, lui donner la puissance nécessaire pour s’acquitter de sa fonction), je ne crois pas, à bien considérer toutes choses, qu’on puisse rien faire de plus utile au salut commun que de créer une seconde assemblée, formée d’un certain nombre de patriciens, et uniquement chargée de veiller au maintien inviolable des lois de l’État en ce qui regarde les corps délibérants et les fonctionnaires publics. Cette Assemblée aura en conséquence le droit de citer à sa barre et de condamner d’après les lois tout fonctionnaire public qui aura manqué à ses devoirs. Je donnerai aux membres de cette seconde Assemblée le nom de syndics.

21. Les syndics doivent être élus à vie. Si, en effet, ils étaient élus à temps, de telle sorte qu’ils pussent par la suite être appelés à d’autres fonctions, nous tomberions dans l’inconvénient déjà signalé, article 19 du présent chapitre. Mais pour qu’une trop longue domination n’exalte pas leur orgueil, il sera établi que nul ne devient syndic qu’après avoir atteint l’âge de soixante ans et s’être acquitté de la fonction de sénateur dont je parlerai plus bas.

22. Le nombre des syndics sera facile à déterminer, si nous considérons que les syndics doivent être aux patriciens ce que les patriciens sont à la multitude. Or les patriciens ne peuvent gouverner que si leur nombre ne reste pas au-dessous d’un certain minimum. Il faudra donc que le nombre des syndics soit au nombre des patriciens comme le nombre des patriciens est au nombre des sujets, c’est-à-dire (par l’article 13 du présent chapitre) dans le rapport de un à cinquante.

23. De plus, afin que le conseil des syndics puisse remplir son office en sécurité, il faudra mettre à sa disposition une partie de l’armée à laquelle il pourra donner tels ordres qu’il voudra.

24. Il n’y aura pour les syndics, et en général pour les fonctionnaires, aucun traitement fixe, mais seulement des émoluments combinés de telle façon qu’ils ne puissent mal administrer la république sans un grand dommage pour eux-mêmes. Car il est juste d’une part d’accorder une rémunération aux fonctionnaires publics, la majeure partie des habitants étant peuple et ne s’occupant que de ses affaires privées, tandis que les patriciens seuls s’occupent des affaires publiques et veillent à la sécurité de tous ; mais d’un autre côté (comme nous l’avons dit à l’article 4 du chapitre VII), nul ne défend les intérêts d’autrui qu’autant qu’il croit par là défendre ses intérêts propres, et par conséquent les choses doivent être ainsi disposées que les fonctionnaires publics travaillent d’autant plus à leur bien personnel qu’ils procurent davantage le bien général.
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